Les accueils sur le lieu fixe en 2011 correspondent à un file active de 664 personnes.
La moyenne d’accueils par jour est de 62 personnes.
La fréquentation du CAARUD est en baisse de 38 % par rapport à l’année précédente.
Cette diminution a été voulue par l’établissement, devant une augmentation inquiétante de l’activité en 2010, ne permettant plus de proposer un accueil satisfaisant. La gestion de 90 à 100 personnes en moyenne par jour se faisait au détriment de l’accompagnement individuel des usagers et générait un “burnout“ collectif.
La survenue de crises institutionnelles à l’occasion de deux accidents du travail et d’un arrêt maladie longue durée nous ont incité à redéfinir les modalités de travail au sein du CAARUD, pour un meilleur cadre d’accueil des usagers et l’amélioration des conditions de travail des salariés.
L’accueil d’usagers de drogues a été privilégié pour les nouveaux arrivants, entrainant une baisse de la file active, composée en grande partie de personnes en difficulté avec l’alcool, ou même de personnes essentiellement en précarité sans troubles addictifs majeurs associés.
La baisse de la fréquentation permet de mieux traiter les demandes. Les usagers du CAARUD apprécient ces changements et la meilleure disponibilité de tous les intervenants.
En revanche l’activité en nombres d’actes reste comparable à celle des années précédentes; le temps consacré à chaque usager est plus important, de même la qualité du travail effectué apparait comme meilleure.
Des partenariats ont été développés avec plusieurs associations et établissements médico-sociaux durant les dernières années. L’ éclairage de ces intervenants a été sollicité et constitue un atout précieux pour les usagers qui fréquentent le CAARUD ainsi que pour l’équipe. Echanger sur des situations avec des professionnels du secteur social et médico-social s’avère mobilisateur pour l’équipe qui s’interroge ainsi sur ses pratiques et appréhende mieux les problématiques rencontrées dans un point de vue construit avec ces partenaires.
De longue date, le CAARUD a du réfléchir et imaginer des réponses aux problématiques des migrants. Du fait de la situation géographique de l’établissement, une quarantaine de nationalités différentes sont recensées parmi les usagers de l’établissement. La plupart de ces personnes sont en situation irrégulière au regard du droit de séjour sur le territoire français, et la tendance parmi les professionnels est de juger qu’il n’y a pas de solutions pour ces personnes sans opportunité d’obtenir un titre de séjour. C’est précisément la raison pour laquelle l’équipe de Beaurepaire a cherché à établir des liens pour un certain nombre de personnes dans leur langue.
Le projet Beaullywood est un exemple de réponse adaptée aux besoins d’un public étranger, ici originaire du Pendjab qui vit dans la clandestinité et ignore tout de ses droits. Au fil de mois d’intervention, la situation juridique de ce groupe n’a pas beaucoup évolué, en revanche la santé physique et psychique des personnes s’est améliorée. Le travail du CAARUD s’est axé sur la sortie de la clandestinité, l’accès aux droits et aux soins (à travers l’AME) et pour certains l’aide au retour avec un projet de réinsertion économique en Inde. La perspective de projet de retour a permis à certains usagers pendjabis de réduire leur consommation d’alcool et de médicaments, avec la renaissance d’un espoir d’avenir.
Qui aurait pu penser que l’aide au retour puisse devenir un outil de réduction des risques ?
Un travail sur les co-morbidités psychiatriques est mené avec l’Equipe de Liaison Psychaitrique (ELP) de La Terrasse - EPS Maison Blanche.
Un travail sur l’alcool, qui reste un des produits les plus consommés par les usagers du CAARUD, est poursuivi depuis 2008 à travers un partenariat avec l’ANPAA 75, autour de la réduction des risques liés à l’alcool et l’accès aux soins pour les personnes présentant des usages à risque et dépendances vis à vis de ce produit.
Des actions de dépistage hors les murs, de Prévention et de Réduction des Risques Sexuels ont été développés en partenariat avec l’association AREMEDIA depuis cinq ans.
Malgré ces nombreuses initiatives développées au sein du CAARUD, il parait de plus en plus nécessaire de repenser la question de l’hébergement des usagers étrangers, et ceci sans conditionner l’accès à l’hébergement à un projet de soin. La réduction des risques s’est construite en opposition à la notion de projet et de contractualisation. La réduction des risques impose de travailler la relation avec les usagers pour réussir à endiguer les dommages liés aux usages de produits. Stabiliser un hébergement serait un préalable à un accompagnement et à un accès au soin, et non l’inverse. Avec la mise à disposition de quelques chambres d’hôtel à l’année, un dispositif « passerelle » souple pourrait se construire, avec des accompagnements progressifs vers les dispositifs de droit commun.
Tableau 1: effectifs de la file active
File Active |
Nouveaux usagers |
Femmes |
664 |
468 |
68 |
Le nombre de nouveaux usagers représente près de 51 % des personnes accueillies.
Tableau 2: classes d’âges
< 20 ans |
20-24 ans |
25-34 ans |
34-45 ans |
> 45 ans |
0% |
6% |
45% |
39% |
10% |
Le profil en termes d’âge est semblable à l’année précédente, la majorité des usagers qui fréquentent le centre ont entre 30 et 40 ans.
Tableau 3: produits consommés, estimation du nombre de consommateurs
Produit |
%age de la file active |
Héroïne |
5% |
Cocaïne |
5% |
Crack |
8% |
Alcool |
70% |
Cannabis |
60% |
Amphétamines |
10% |
LSD |
3% |
Ecstasy |
5% |
Buprénorphine |
20% |
Méthadone |
15% |
Sulfate de morphine |
10% |
Benzodiazépines |
25% |
L’alcool reste le produit le plus consommé, devant le cannabis et les médicaments détournés de leur usage. La précarité des usagers et la disponibilité de ces produits dans la rue expliquent en partie ces consommations.
Tableau 4: actes réalisés
|
Actes sur place |
Orientat° du médecin |
Orientat° de l’éq.éduc. |
Accompag. |
Total |
Médecine générale |
333 |
115 |
71 |
23 |
542 |
Aide à la substitution aux opiacés |
|
11 |
13 |
9 |
33 |
Prise en charge problèmes d’alcool |
44 |
10 |
18 |
6 |
78 |
Suivi psychologique ou psychiatrique |
|
10 |
18 |
9 |
37 |
Traitement VIH |
48 |
|
|
|
48 |
Urgences |
|
17 |
28 |
18 |
63 |
Soins du podologue |
125 |
4 |
25 |
|
191 |
Entretien psychiatrique ELP |
15 |
8 |
12 |
6 |
|
Total |
565 |
175 |
185 |
71 |
996 |
Tableau 5: accès au droits
|
dossiers ouverts |
Orientat° et accompag. |
Droits sociaux(RMI, AAH, API…) |
24 |
|
Droits à la Santé(CMU, CMU-C, AME…) |
85 |
25 |
Démarches administratives(papiers, domiciliations) |
124 |
15 |
Démarches justice(assignation, obligation de soin…) |
36 |
6 |
Total |
269 |
46 |
Les membres de l’équipe éducative se relaient pour évaluer les situations des usagers. Le choix des orientations et la mise en place d’hébergements se discutent quotidiennement en équipe.
L’accompagnement social est fondamental surtout pour les usagers en situation irrégulière, qui ne peuvent accéder qu’à une domiciliation et à une Aide Médicale d’Etat.
Tableau 6: accès au logement
Hébergement |
Dossiers ouverts |
Hébergement d’urgence |
782 |
Hébergement social (CHRS…) |
11 |
Hébergement thérapeutique (CTR, ATR, ACT, CT) |
6 |
Recherche de logement autonome |
2 |
Total |
801 |
Le CAARUD dispose d’une chambre d’hôtel à l’année destinée aux usagers les plus épuisés ou présentant un tableau clinique plus inquiétant (insuffisant pour accéder à une hospitalisation mais nécessitant une mise à l’abri et au repos).
En 2011, 60 personnes ont pu y avoir accès, pour des séjours de trois jours en moyenne, ce qui correspond à 483 nuitées, dont 191 nuitées dans le cadre du projet Beaullywood destiné aux usagers originaires du Pendjab.
Une assistante sociale, présente une journée par semaine, apporte un éclairage technique à l’équipe éducative du CAARUD. Sa contribution permet de faire avancer certains dossiers et situations. Ses modalités d’accueil sans RDV permettent aux usagers d’avoir une réponse rapide relayée ensuite par l’équipe éducative.
Tableau 7: insertion et réinsertion professionnelle
Type de recherche |
Dossiers ouverts |
Recherche d’un emploi |
33 |
Recherche d’une formation |
5 |
L’accès à l’insertion professionnelle reste une difficulté majeure pour de nombreux usagers. La situation irrégulière de près des deux tiers des personnes qui fréquentent le CAARUD les enferme dans une précarité aussi difficile à vivre que leurs problèmes d’addiction. La nécessité de les accueillir et de les soutenir au quotidien est un enjeu important pour l’équipe éducative.
Le recours au travail au noir est très fréquent et nombreux usagers sont victimes d’employeurs qui ne le payent pas ou les font travailler dans des conditions extrêmement difficiles voire dangereuses. Les accidents de travail sont fréquents pénalisant doublement ces usagers qui essayent de survivre en acceptant de telles conditions de travail.
Un accompagnement éducatif au CAARUD Beaurepaire
Brahim RIYACHI, éducateur spécialisé
L’éthique et la déontologie professionnelle protègent les travailleurs sociaux du risque de jugements de valeur liés à des convictions personnelles, références morales… L’éducateur, responsable de ses actes vis-à-vis du public, de ses collègues et des lois, doit agir avec intégrité sans abuser de la confiance de la personne dans des projets non réalisables.
Le débat, l’évaluation et les moments de régulation permettent de faire vivre et de questionner Ethique et Déontologie et d’en interroger l’articulation et la complémentarité.
Ethiquement, la position est de considérer tout individu comme sujet de son histoire et de son intention propre, et lui reconnaitre sa singularité et sa capacité à exercer ses choix et ses aspirations.
Quand un usager, quelle que soit sa problématique, s’adresse à l’intervenant, celui-ci doit l’écouter en cherchant ce qui est dit au-delà de sa parole explicite, de son apparence et de ses codes de langage. Il arrive parfois que cet usager "arrange" son histoire. Dans ces moments-là, il convient plus encore de ne pas juger mais plutôt de chercher derrière chaque mot une vérité cachée ou une angoisse dissimulée.
Face à une personne en difficulté, l’important est de répondre à ses besoins, d’aller à sa rencontre, afin de saisir le sens des perspectives qu’elle souhaite poursuivre. Ce parcours est à construire avec lui; il peut être chaotique et semé d’embuches mais doit être accompagné dans la confiance et la recherche de cohérence.
A propos d’une situation : James âgé de 41 ans, présente une problématique alcoolique et vit à la rue depuis six ans; il passe son temps à récupérer des objets trouvés, à les rénover pour les revendre ensuite à la sauvette sur les « marchés aux voleurs ». La rénovation est une véritable passion pour lui, mais il ne veut pas travailler pour un employeur car il a eu une mauvaise expérience. Il y a quelques années, lorsqu’il travaillait chez un antiquaire, James a dû intenter une action aux prudhommes pour récupérer le salaire qui lui avait été refusé pendant trois mois. Le souhait de l’éducateur était qu’il postule pour un emploi dans une entreprise accompagnant les personnes en difficultés (Emmaüs Défi). Malgré de nombreuses discussions sur cette possibilité avec James, le fait de gagner de l’argent sans contrainte continuait de plus lui convenir. Pourtant un jour, James a sollicité une aide pour trouver du travail en tant qu’artisan. Sa demande a été appuyée auprès de la Mairie et il a obtenu une autorisation de vendre ses objets sur certains marchés parisiens. Aujourd’hui, bien que « son entreprise » peine à être rentable, James est plus satisfait de son sort et projette même de demander un local à faible charge à la Mairie d’Aubervilliers afin d’avoir assez d’espace pour y rénover ses objets.
Suite à toutes ces démarches, James se rend aujourd’hui aux réunions d’Alcoolique Anonyme (AA) qui lui avaient été présentées il y a quelques temps. Il a cessé de consommer de l’alcool depuis plus de deux mois. Dans le cas de James, c’est la réinsertion dans la vie professionnelle via ses propres choix qui lui ont permis de dépasser son problème d’alcoolisme.
Le principe d’intervention est de positiver toute démarche d’insertion sociale en privilégiant le recours aux dispositifs de droit commun, et en exploitant les possibilités du réseau.
Un éducateur est à l’écoute des personnes qu’il accompagne individuellement pour apprendre à les connaître tout en prenant en compte leur environnement et en restant disponible pour le groupe auprès duquel il intervient. Il actualise sa pratique et ses connaissances par des apports théoriques et par les échanges avec les différents professionnels pour élargir et enrichir son champ de compétences. Cela lui permet ainsi de toujours apporter une aide de qualité aux usagers.
La communication est un outil de travail privilégié pour mener à bien l’accompagnement des usagers. Le savoir théorique acquis au fur et à mesure de l’exercice professionnel est essentiel pour comprendre certaines situations. L’écoute et l’observation sont également des qualités essentielles à la disponibilité vers les personnes mais dans la distanciation.
Un éducateur a pour première obligation de se débarrasser de ses projections personnelles pour mieux entendre ce que les personnes ont à dire et ne pas les enfermer dans des images préconçues. Cette écoute permanente paraît nécessaire pour adapter de manière pertinente les actions éducatives.
La relation que le "référent" établit avec chaque usager participe à la co-construction d’un projet, respectant avant tout la singularité de chacun, tenant compte de son histoire personnelle, de son environnement social et familial (coutumes, culture, besoins…) ainsi que des problèmes qu’il a rencontrés (précarité, alcoolisme, toxicomanie, marginalité).
Transmettre aux usagers désocialisés des repères sur les codes de vie en société, leur permettre de viser un mieux-être social, participe de leur autonomisation et resocialisation. L’action éducative passe aussi par l’accompagnement vers des activités socio-culturelles, espace propice à la prise de conscience de soi dans l’environnement.
L’ensemble de ce travail nécessite l’interaction entre les différents intervenants à l’intérieur et à l’extérieur de la structure. Les moments de réunions et de réflexion sont indispensables car ils permettent à l’éducateur de prendre le recul nécessaire pour affiner son analyse et ajuster ses actions éducatives. Les échanges avec des interlocuteurs extérieurs à la structure sont autant d’apports qui enrichissent la compréhension des différentes situations. Prendre en compte les points de vue des autres professionnels permet ainsi d’adapter en permanence son travail. Confronter les perspectives permet souvent de faire émerger un nouveau regard sur la situation des différentes personnes accompagnées.
Donc les compétences et les principaux savoirs du travail éducatif en CAARUD sont :
Tableau 8: mise à disposition du matériel de prévention
Matériel stérile |
Nombre |
Matériel distribué par automates :- kits, steribox, kap |
0 |
Trousses d’injection délivrées par l’équipe du caarud :- kits, steribox, kap |
362 |
Seringues distribuées à l’unité par l’équipe du caarud- seringues 1cc- seringues 2cc |
2378 1782 |
Jetons distribués |
463 |
Brochure et matériel d’information |
0 |
Récupération de matériel usagé :- seringues souillées récupérées |
984 |
Préservatifs femmesPréservatifs hommesGel lubrifiant |
0 5000 3000 |
StérifiltsStéricupsEau PPI (5 ml)Tampons alcoolisés |
880 1188 1293 1557 |
Pipes à crack |
0 |
Embouts |
72 |
Matériel de sniff :- Roule ta paille |
0 |
Récupérateurs de seringues mis à disposition |
12 |
Concernant le programme d’échange de seringues, la file active s’élève à 33 usagers dont 5 femmes, qui ont eu accès très régulièrement au programme d’échange pendant l’année.
Tableau 9: produits injectés
Produit |
Nombre |
Skenan |
11 |
Crack |
8 |
Subutex |
7 |
Héroïne |
4 |
Amphétamine |
2 |
Polyconsommation |
12 |
Dans le but d’améliorer les prestations du programme d’échange de seringue et la dispensation de matériel stérile, il y a eu réorganisation du local où se réalisent les échanges et des conseils de prévention / réduction des risques aux usagers concernés : création d’un comptoir pour formaliser la séparation avec la salle, et mise en place d’une armoire murale pour stocker le matériel.
Donc tout en ayant la possibilité de rester à l’écoute de ce qui se passe en salle, cette configuration permet aux intervenants de se poser et d’échanger dans de bonnes conditions. Au-delà, cet espace un peu privilégié, donne à l’usager plus de possibilité pour s’exprimer sur ses consommations, car il n’est ni vu ni entendu par les autres en salle, et a l’impression d’être reçu dans l’espace « réservé aux éducateurs ».
C’est très souvent dans ce contexte que les consommateurs livrent des informations sur les produits consommés, les endroits où ils se fournissent, etc… ainsi que la qualité des drogues en vente dans la rue.
Le CAARUD Beaurepaire a développé depuis fin 2010 une collaboration avec une équipe de maraude sociale, en effectuant du travail de rue, et l’Association Charonne a souhaité formaliser la collaboration entre le CAARUD Beaurepaire et l’antenne Paris 10 de l’association « Aux Captifs la Libération ». Un travail de rue en binôme est mené par une éducatrice du Centre Beaurepaire et un bénévole de l’antenne Paris 10 chaque vendredi après midi, selon deux itinéraires alternativement effectués.
En fonction des personnes rencontrées, des intervenants orientent les usagers rencontrés soit sur le Centre Beaurepaire où ils bénéficient des prestations médico-sociales du CAARUD, soit sur l’Espace Solidarité Insertion de la rue de Rocroy.
Cette équipe effectue un travail de contact et de soutien auprès des personnes qui ne fréquentent pas les structures. Elle accompagne et maintient le lien avec les personnes hospitalisées ou admises en Lit Halte Soin Santé (LHSS). Enfin elle accompagne dans leurs démarches administratives et sociales les personnes rencontrées.
30 tournées sur l’année. Le nombre de personnes rencontrées varie entre 5 et 12 par tournée, soit environ 300 contacts sur toute l’année, avec 95% d’hommes pour 5% de femmes.
L’origine des personnes rencontrées est (estimation) :
Tableau 10: origine des personnes rencontrées (estimation)
Zone géographique |
%age |
Afrique sub-saharienne (Côte d’Ivoire, Mali, Sénégal, Congo, Gabon, Guinée‑Bissau) |
20% |
Afrique du nord (Algérie, Tunisie, Maroc) |
20% |
Moyen-orient (Iran, Irak, Syrie) |
5% |
Balkans (Turquie, Roumanie, Bulgarie, Albanie) |
15% |
Amérique Nord, Sud (USA, Brésil) |
5% |
Asie (Inde, Pakistan, Afghanistan) |
5% |
Union européenne (Allemagne, Belgique, Espagne, Pologne, République Tchèque, Pays Baltes) |
20% |
France |
10% |
Les problèmes rencontrés :
On a eu une dizaine de visites à l’hôpital et 2 orientations et accompagnement sur des Lits Halte Soins Santé (Centre Maubeuge).
En ce qui concerne les accompagnements, la convention entre Charonne et Les Captifs permet d’utiliser les réseaux des deux associations pour donner suite à la rencontre des personnes dans la rue. Avec l’aide des travailleurs sociaux des deux associations, des solutions sont recherchées pour la domiciliation, l’Aide Médicale et les soins grâce aux permanences d’un médecin généraliste au CAARUD Beaurepaire.
Un contact avec l’Ambassade d’Allemagne par l’intermédiaire de L’Entraide Allemande a permis d’obtenir des passeports pour 6 personnes allemandes sans papiers. Deux personnes à la rue ont pu être aidées à retourner dans leur pays où ils bénéficient de programmes d’intégration.
Enfin 27 orientations d’usagers ont été effectuées sur le CAARUD, 39 sur l’Espace Solidarité Insertion Aux Captifs la Libération.
Le regard d’une stagiaire
Agnès VINCENTI, éducatrice spécialisée, 3ème année
Au cours de ces trente semaines de stage, j’ai fait la connaissance d’un public souvent sans domicile fixe, usagers de substances psycho actives illicites et/ou alcooliques. Les craintes et les préjugés qui m’animaient au début, relatifs à cette précarité et à ces consommations, se sont progressivement estompés. En échangeant avec les usagers - pour la grande majorité des hommes d’une quarantaine d’années -, je me suis en effet rendue compte que, s’ils ont des attentes différentes par rapport à leur consommation (arrêt, régulation…) et leur situation sociale, ils sont désireux d’établir un contact avec toute personne susceptible de leur apporter une aide. Et, pour ceux qui ne demandent rien de particulier, une simple écoute et un lieu où se reposer leur apportent beaucoup.
La principale barrière qui fut celle de la langue : le centre Beaurepaire accueille des personnes d’une quarantaine de nationalités différentes, dont de nombreux Indiens et des gens des pays de l’Est, avec lesquels la communication est compliquée.
J’ai également appris à traiter des problématiques liées entre elles, à savoir l’usage de drogues, d’alcool, la vie à la rue, la volonté de s’en sortir via la recherche d’un logement et d’un emploi stables. Souvent, avant cela, la survie est la principale occupation, à travers la recherche effrénée et quotidienne d’une réponse aux besoins primaires : alimentation, hygiène, vestiaire, hébergement d’urgence. Ces derniers sont souvent occultés pour laisser place à l’assouvissement des états de manque des produits dont les usagers sont consommateurs.
Répondre à ces problématiques en accompagnant les usagers dans leurs démarches a consisté à effectuer des entretiens individuels, des accompagnements à l’ambassade, des visites à l’hôpital Fernand Widal pour les personnes qui effectuent un sevrage, aider les usagers dans la rédaction de leurs CV et lettres de motivation, appeler le SAMU Social et le Service Intégré de l’Accueil et de l’orientation (SIAO) pour aider à la recherche d’un hébergement d’urgence. J’ai ainsi pu apprendre à me positionner en tant que professionnelle, en acquérant progressivement le plus d’autonomie possible. Cela fut notamment effectif grâce à la liberté suffisante que m’a laissé l’équipe pour apprendre par moi-même, tout en m’aidant chaque fois que j’en ai eu besoin.
Par ailleurs, il m’est arrivé de distribuer du matériel de Réduction Des Risques à certains usagers, et ainsi de répondre à une des missions principales du CAARUD.
Enfin, comme j’en avais formulé le souhait dans mon projet de stage, j’ai également pu faire des maraudes pour aller à la rencontre des gens dans la rue. Si brefs soient les moments passés avec un groupe ou une personne isolée, ils apportent toujours un soutien ponctuel qui peut parfois mener à un accompagnement à plus long terme.
L’approche globale de la situation des usagers du CAARUD conduit à se préoccuper au quotidien des problèmes de santé, à favoriser un accès au soin et à l’hygiène, et de proposer des orientations ou des conseils pertinents dans ces domaines. Ceci passe également par la nécessité d’effectuer un travail autour du corps, de réaliser des soins primaires, afin d’éviter que de petites plaies bénignes ne se transforment en infection plus grave, et par beaucoup de travail d’entretien et d’information/prévention pour amener ces personnes à une bonne gestion des traitements qui leurs sont prescrits.
Beaucoup sont atteints de problèmes d’ordre dermatologique, (gales et parasites divers, mycoses, eczema et psoriasis…); des soins sont proposés sur place, en fournissant les produits adaptés et de nouveaux vêtements lorsque c’est possible, où bien des orientations sont proposéEs vers le service de dermatologie, via la PASS Verlaine, de l’hôpital St Louis.
Pour certains d’entre eux, atteints de maladie chronique ou de pathologie demandant un traitement médicamenteux régulier, la gestion des traitements peut être proposé par le CAAUD (conserver des médicaments avec soi dans certaines situations peut s’avérer difficile, voire dangereux…), et une délivrance fractionnée est organisée, assortie de conseils et d’informations sur les prescriptions.
Au total, environ 900 actes de santé.
Par ailleurs, l’année 2011 a été marquée par le décès de plusieurs usagers connus de longue date, suivis depuis de nombreuses années par l’équipe, ce qui a incité à consolider les échanges avec le « collectif des morts de la rue » afin de permettre une inhumation digne de ce nom. Cette action est très appréciée des proches «camarades de rue» de ces personnes décédées. Elle fait partie intégrante de l’identité du CAARUD…
Tutorat des stagiaires infirmiers
Éric DELCOURT
Éducateur et aide-soignant
Par le biais de l’institut de formation en soins infirmiers de la Croix st Simon et de Nanterre, nous accueillons régulièrement des étudiants pour des stages de 5 à 10 semaines. Ces stages intitulés « lieux de vie » sont des périodes de formation « hors champ médical » pour ces élèves infirmiers et ne nécessitent pas d’encadrement infirmier spécifique.
Les retours des instituts de formation comme des élèves eux-mêmes sont plutôt positifs, et les demandes sont nombreuses, émanant parfois d’autres instituts, à tel point que nous n’avons plus de disponibilités. Là encore il s’agit d’une activité non négligeable, demandant du temps mais ayant également son importance.
Il y a eu 343 consultations qui concernaient 154 personnes (144 hommes et 10 femmes – soit6%).
Tableau 11: suivi des patients
|
2010 |
2011 |
||
Nbre de consultants |
175 |
154 |
||
vus 1 fois |
100 |
57% |
79 |
51% |
vus 2-5 fois |
|
|
49 |
32% |
>6 fois |
|
|
29 |
19% |
>10 fois |
5 |
|
2 |
|
Comme les autres années :
Il s’agit de personnes qui ont fortement investi le CAARUD et présentent une comorbidité importante addictions / pathologies somatiques (la comorbidité psychiatrique étant une constante dans la population du CAARUD). Nous projetons d’étudier de manière plus systématique leur situation en ce qui concerne les actions de dépistage et de prévention en médecine générale.
Tableau 12: origine des consultants
Origine |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
France |
27% |
14% |
18% |
20% |
Inde |
15% |
22% |
17% |
16% |
Pologne |
20% |
12% |
19% |
13% |
Bulgarie + Roumanie |
|
n.c. |
n.c. |
12% |
Maghreb |
13% |
9% |
12.5% |
10% |
Autres |
25% |
43% |
33.5% |
29% |
Tableau 13: couverture sociale des consultants
Couverture sociale |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
Sans |
45% |
55% |
40% |
54% |
AME |
15% |
24% |
30% |
30% |
CMU |
25% |
17% |
10% |
17% |
Les étrangers représentent une part importante des usagers du centre Beaurepaire et des consultants du médecin, avec, depuis plusieurs années, une part importante de ressortissants polonais et indiens (pour lesquels des actions spécifiques ont été menées) et dans une moindre mesure des personnes originaires d’autres pays d’Europe de l’Est ou du Maghreb.
Toute couverture sociale est le plus souvent absente et des orientations sont réalisées vers les PASS parisiennes (principalement Verlaine et Baudelaire).
Les motifs les plus fréquents sont inchangés au cours des années :
Tableau 14: motifs de consultation
Motif |
%age |
Problèmes dermatologiques (plaies, infections, parasites, eczéma) |
19% |
Troubles musculo-squelettiques (contusions, entorses, fractures) |
17% |
Infectiologie (aide gestion des traitements) |
12% |
Pathologies infectieuses voies aériennes supérieures bénignes |
10% |
Addictions |
7% |
Les orientations (186) se font principalement vers…
Tableau 15: orientations ; N=186
Orientation |
%age |
Hôpital Saint- Louis (PASS Verlaine, Dermatologie et Urgences) |
20% |
Hôpital Lariboisière (Urgences, Orthopédie, ORL, Médecine Interne) |
9% |
Autres hôpitaux de l’AP-HP |
9% |
CSAPA Charonne |
7% |
Autres CSAPA du nord-est parisien |
7% |
Hôpital Fernand Widal (alcoologie) |
3% |
Équipe de Liaison Psychiatrique La Terrasse |
3% |
CCAS, centre mutualiste, (Spécialistes de ville, Biologie, Radiologie) |
12% |
Médecins généralistes de ville |
3% |
Les actions de dépistage « Hors les murs » sont réalisées par l’association AREMEDIA avec laquelle un partenariat est établi depuis cinq ans. Les prélèvements sanguins ont lieu sur place. Les résultats sont retournés au centre dix à quinze jours plus tard et restitués par le médecin du centre.
L’année 2011 a été marquée par une baisse significative des dépistages au cours du premier semestre (6 dépistages sur 2 actions et uniquement 2 résultats rendus). Cette période était difficile pour l’ensemble du centre (équipe restreinte, modification de la file active). Au deuxième semestre le nombre de dépistage est revenu à des valeurs habituelles (10 à 15 dépistés par actions avec 70% de résultats rendus).
Au total 41 personnes ont été dépistées (34 usagers et 7 membres de l’équipe ou stagiaires).
Avec pour bilan :
Les rendus des résultats (27 personnes au centre Beaurepaire et 2 personnes au CDAG) sont les suivants :
Au cours de l’année 2011 un protocole d’approvisionnement de vaccins a été mis en place avec la DASES, protocole qui sera effectif sur le centre Beaurepaire en 2012.
Le centre Edison intervenait les années précédentes une fois par an pour effectuer des radiographies pulmonaires. Cette action n’a pas été renouvelée en 2011.
Dans le cadre d’un partenariat avec l’association Gaïa et l’association EGO un appareil permettant de réaliser des fibroscans réside pendant plusieurs semaines alternativement dans les centres Gaïa, Beaurepaire, B18 (Charonne) et STEP (EGO). Il permet d’effectuer une mesure de l’élasticité du foie, mesure simple, non douloureuse et non invasive, qui renseigne sur le degré de fibrose hépatique, élément majeur dans l’indication d’un traitement de l’hépatite C. Cette mesure est également utile pour le suivi d’autres pathologies hépatiques, notamment celle du à l’alcool.
Au cours de l’année 2011 le fibroscan nous a permis d’évaluer le degré de fibrose hépatique de 13 personnes. Les résultats sont les suivants :
Tableau 16: résultats du fibroscan
Degré de fibrose |
Nombre |
F0 |
8 |
F2 |
2 |
F4 |
3 |
Un mode de rotation sur des plages plus courtes et plus fréquentes permettrait vraisemblablement d’optimiser l’utilisation du fibroscan sur le CAARUD.
Médecin généraliste en Caarud : un travail permanent de mise en relation
Le travail d’interface s’exerce à tous les niveaux :
Dans le cadre des consultations il s’agit d’abord d’obtenir les moyens d’une relation effective avec la personne qui consulte :
Consolider et élargir les moyens disponibles :
Participer à la vie institutionnelle de la structure :
Le but de ce travail est d’améliorer l’accès au soin, médical bien sûr, mais également dans d’autres domaines, car le soin médical, parfois vital, reste très limité et souvent inefficient si la personne ne dispose pas aussi d’un relatif bien-être social (hébergement, couverture sociale, réseau de sociabilité) et de possibilités d’alimenter l’estime de soi.
L’activité du podologue au sein de l’association Charonne s’est encore développée durant l’année 2011. Le nombre de soins effectués au centre Beaurepaire sur une demi-journée d’activité hebdomadaire s’élève à 125 pour une file active de 68 personnes.
La problématique principale pour la population qui vient consulter le podologue au centre Beaurepaire est un problème d’atteinte mycosique. Ce problème est directement lié à la situation très précaire dans laquelle vivent les usagers de cette structure.
La première chose mise en place pour le traitement antimycosique est une désinfection des pieds grâce à un bain de pieds de permanganate de potassium. Ensuite le traitement est basé sur des soins quotidiens à la Bétadine (action antimycosique à large spectre). Des conseils d’hygiène sont donnés aux usagers (changement quotidien des chaussettes, bon séchage des pieds…). Si cela ne suffit pas, des poudres spécifiques contre les mycoses sont utilisées.
L hiver 2011 a été particulièrement rigoureux, pour autant il n’y a pas eu à traiter des pathologies à type d’engelure. Un affichage avait été mis en avant dans les 2 CAARUD pour la prévention des pieds par grand froid. Il est néanmoins difficile de connaître l’impact réel de cet affichage.
L’atelier guitare se déroule tous les mardis après-midi de 14h à 17h dans les locaux de Aurore - Itinérances situés sur le boulevard Magenta dans le 10ème arrondissement. Sous la conduite d’un éducateur et le plus souvent d’un travailleur social stagiaire du centre Beaurepaire, les usagers participent de manière entièrement volontaire et sans obligation de savoir pratiquer l’instrument. Ils viennent d’Itinérance, de Beaurepaire, mais aussi d’autres structures ou partenaires (CSAPA Charonne, Ego, Narcotiques Anonymes…).
Les usagers peuvent arriver et partir lorsqu’ils le souhaitent dans l’après-midi. Cette liberté est primordiale car elle leur permet ainsi de s’investir en confiance, en restant à tout moment maîtres de leurs choix.
L’atelier guitare n’est pas un lieu où l’on apprend d’abord la pratique de l’instrument, mais avant tout un espace d’échanges où des liens se tissent entre les usagers et l’éducateur.
Ce temps leur permet de se « poser » pour pouvoir exprimer librement leur état/situation du moment, leurs difficultés, leurs démarches et leurs souhaits.
D’un point de vue musical, les niveaux instrumentaux sont très variés, allant du novice au musicien confirmé et désireux d’apprendre davantage, voire d’intégrer un groupe si ce n’est pas déjà le cas. Cela amène les usagers à échanger également entre eux, à se connaître ou à se découvrir sous un autre angle que sous celui de la rue bien souvent. Cet aspect de socialisation est motivant mais présente également des complications lorsque, par exemple, des usagers ne s’entendent pas de par leurs personnalités, ou parce que certains plus expérimentés n’apprécient pas d’attendre ceux qui apprennent. De plus, ils n’ont pas tous les mêmes attentes. Certains viennent pour l’aspect musical uniquement, pour apprendre et progresser dans la pratique de l’instrument. D’autres savent que le cadre restreint de l’atelier permet une écoute particulière de la part de l’éducateur et se sentent davantage en sécurité pour « se livrer », se décharger leurs soucis. Dans tous les cas, l’éducateur sort de son rôle habituel, et la convivialité prend le dessus sur l’éducatif le temps d’une après-midi. Il n’est d’ailleurs pas rare que l’atelier se termine dans un café (pour une consommation de boissons non alcoolisées), dans un cadre encore plus libre qui permet d’échanger des informations parfois plus personnelles.
Par là, l’atelier guitare renouvelle l’estime et la confiance en soi des usagers. Les personnes débutantes ne peuvent que progresser : cette valorisation ne peut donc que redonner de la confiance en soi à chacun. Certains étant dans un état dégradé et ne se croyant plus capables de rien voient là un tremplin pour continuer à aller de l’avant dans d’autres domaines.
En outre, cela permet d’investir autre chose que, pour certains, la recherche effrénée d’un produit. Même si cela n’est que temporaire, l’atelier permet un repos non négligeable du corps et permet à l’organisme de récupérer un peu d’énergie. Et, au-delà du travail qui doit être régulier, l’atelier est un moment de détente qui permet à tous de « de se vider la tête ».
Pendant la période du « festival de la rue », en mai 2012, nous espérons pouvoir inscrire à nouveau deux personnes de l’atelier pour se produire en public sur le parvis de Notre Dame de Paris. Cette présence peut s’avérer très utile pour éviter une routine de la part des « anciens» et permettre à ceux qui se produisent d’être valorisés.
La file active de cette année 2011 est de 30 personnes dont 5 femmes, qui viennent de quatre structures différentes. Elle est quasiment semblable à celle de l’année précédente.
La moyenne de participations par séance est de 4 personnes.
Pour favoriser l’accès à la prévention des risque liées aux consommations d’alcool, à la RdR et l’accès aux soins des usagers de drogues, des permanences de l’ANPPA sont assurées au CAARUD Beaurepaire depuis 2008.
A la demande de l’équipe du CAARUD et après réflexion commune sur les modalités d’action, des entretiens individuels ont été mis en place avec les usagers demandeurs.
L’intervenant ANPAA est présent une matinée par mois, et rencontre en moyenne 2 à 3 usagers par permanence. Depuis 2008, le même animateur de l’A.N.P.A.A. 75, éducateur spécialisé, est référent du CAARUD Beaurepaire afin d’être mieux repéré et de créer du lien plus facilement.
Des échanges réguliers avec l’équipe permettent de faire évoluer les actions (fréquence, durée, outils…) et de favoriser les échanges de pratiques (alcoologie, orientations…).
les publics visés sont les usagers qui fréquentent le CAARUD et les professionnels socio-éducatifs qui y travaillent.
Les objectifs stratégiques :
Les objectifs opérationnels :
Ces permanences ont permis de faciliter l’accès aux soins vers le service d’addictologie de l’hôpital Fernand Widal. Cela a permis en 2011 l’orientation et l’accompagnement par le CAARUD Beaurepaire de 3 usagers. Ces usagers ont été hospitalisés pour un sevrage.
Depuis 2005, l’association AREMEDIA en partenariat avec le CDAG Fernand Widal organisent des actions de dépistage « Hôpital Hors Les Murs » pour le VIH, les hépatites B, C et la syphilis au sein du CAARUD Beaurepaire.
C’est dans cette dynamique de prévention et de promotion de la santé, et à l’issue de l’évaluation annuelle 2010 qu’il est apparu important de renforcer cette offre de dépistage. Pour donner davantage de sens et de cohérence au dépistage, il est primordial de créer des espaces permettant de traiter de façon plus globale les problématiques de prises de risques.
Cette approche implique que les acteurs soient accompagnés pour bâtir un socle commun de connaissances et de compétences, et pour ainsi harmoniser leur discours et adopter une posture commune.
AREMEDIA et le CAARUD Beaurepaire ont initié auprès de l’équipe de Beaurepaire, un travail de réflexion, d’information et de sensibilisation autour des prises de risques sexuels. Ce projet est décliné en 5 ateliers mensuels de 2 heures dans les locaux de l’association.
Il implique les usagers, et constitue un support pour l’équipe rendant moins difficile l’amorce d’échanges avec les usagers sur ces questions.
En 2011, deux ateliers ont été animés en novembre et décembre par les intervenants d’AREMEDIA, l’animatrice de prévention, référente du dispositif HHLM et le Coordinateur.
Le premier atelier a permis de définir un cadre de travail au cours d’une réunion de service réunissant l’ensemble de l’équipe : présentation la méthodologie de travail et de l’organisation des ateliers; mise au même niveau de connaissances tous les acteurs.
La deuxième partie de l’atelier a été consacrée à l’élaboration d’un diagnostic partagé. Répartis en deux groupes hétérogènes, les professionnels, ont pu s’exprimer sur leur perception et leur pratique d’accompagnement des usagers concernant la problématique des prises de risques liées à la sexualité. Cet exercice a permis de faire émerger les représentations individuelles et d’identifier des prises de risques objectives des usagers. A cette occasion il a été possible de vérifier la cohérence ou la divergence des propos des usagers selon les différents interlocuteurs.
Le deuxième atelier a été organisé autour de 2 petits groupes qui avaient comme consigne de travailler sur les 4 sérologies dépistées lors des interventions d’AREMEDIA. Il s’agissait de de préciser pour chaque situation les notions de base indispensables (description, mode de transmission, pathologies etc.) pour accompagner plus efficacement les usagers.
A l’issue de cet atelier il est ressorti :
Dr CHU Ba Dung, praticien hospitalier
ELP - la Terrasse - EPS Maison Blanche
L’année 2011 a vu la pérennisation de la collaboration entre les deux structures, ELP intervenant régulièrement des présences régulières ou ciblées à visée d’évaluation clinique, et par sa participation à des réunions institutionnelles et en effectuant une activité de liaison avec les structures sanitaires.
Plus que des chiffres, la description d’une prise en charge ayant débuté en 2007 peut illustrer la nécessité d’un travail en réseau constant autour de patients présentant une addiction et des troubles psychiatriques :
Le début de la prise en charge par ELP de M. I. s’effectue en décembre 2007 suite à la demande du médecin généraliste du CAARUD pour une évaluation d’une personne présentant une addiction à l’alcool et des troubles du comportement à type d’hétéro agressivité.
Un rendez vous est donné assez rapidement au centre de consultation La Terrasse, mais le patient ne s’y rend pas, et la décision est prise d’effectuer une rencontre sur le site de Beaurepaire. Le lieu de l’évaluation peut varier en fonction du désir de l’équipe de Beaurepaire de pouvoir ou non « extraire » le patient de l’environnement du CAARUD, ce qui peut aider à la prise en charge ou réduire les interactions rendant compliquée l’évaluation.
Finalement la rencontre avec le patient a lieu : il s’agit d’une personne d’origine roumaine, venue en France en 2001 et dont la consommation d’alcool date au moins de son arrivée en France. Le patient a semble-t-il travaillé dans le bâtiment, et dans des activités de déménagements.
Actuellement M. I. ne peut plus travailler en raison d’un accident traumatique rachidien suite au port de charges lourdes. Il n’a pas de domicile fixe et est accompagné de son frère; son épouse et ses enfants sont restés au pays. La consommation d’alcool s’effectue en continu tout au long de la journée, principalement de la bière, elle s’accompagne aussi de prise de cannabis.
L’évaluation clinique met en premier plan une labilité de l’humeur, faite tour à tour d’irritabilité et de tristesse, avec des passages à l’acte hétéroagressifs impulsifs démontrant une perte du jugement. Un état d’épuisement physique est mis en avant par le patient qui l’attribue à des troubles du sommeil (difficultés d’endormissement dues à la situation dans la rue).
Un projet de prise en charge par un CSAPA est mis en place.
Mais l’évolution clinique a finalement justifié une hospitalisation pour sevrage à l’hôpital Fernand Widal (service d’hépato gastro entérologie). Un syndrome de sevrage, une accentuation de l’impulsivité ainsi qu’un état d’épuisement physique ont contribué à cette admission moins d’un mois après le premier contact.
L’hospitalisation de sevrage a duré deux semaines, permettant une sédation des troubles du comportement ainsi que des signes de sevrage. Cependant l’hospitalisation n’a pu être menée au delà, en raison de la difficulté du patient à respecter les règles du service.
Par la suite, des ré-alcoolisations sont très rapidement réapparues; des consultations de suivi ont eu lieu à la Terrasse, avec prescription de sédatifs pour les troubles du sommeil. Le patient a finalement échappé aux propositions de suivi par les deux structures (ELP / BEAUREPAIRE), gardant contact de manière aléatoire. Une mise en lien avec l’association EMMAUS permettant via l’hébergement dans un CHRS de tenter un projet de réinsertion, mais les troubles du comportement du patient ont mis en échec ce projet.
De 2008 à 2011, nous rencontrons surtout le patient sur le site de Beaurepaire, de manière épisodique et à la demande du patient. D’un point de vue clinique, la situation se dégrade (accidents infectieux, vomissements hémorragiques, imprégnation alcoolique plus importante, impulsivité, errance …) tant au niveau somatique que psychologique et addictif. Durant cette période les deux structures continuent d’évoquer la situation du patient et d’offrir ponctuellement tout ce qui peut être aidant à la situation : consultations, bilan somatique, hospitalisations de sevrage, nuitées d’hôtel, aide sociale…
À la fin 2011, le patient sollicite une consultation à la Terrasse où il évoque une abstinence datant de quelques semaines et une forte préoccupation vis-à-vis de la consommation alcoolique de son frère. Cette consultation n’aboutit à aucune prescription.
En conclusion, ce cas clinique illustre de manière concrète la manière dont s’effectue la collaboration entre les deux structures. Des présences régulières de ELP permettent de maintenir un lien informel avec le patient qui à certaines périodes n’est pas forcément demandeur de soins. Ce qui nous paraît important est de toujours montrer notre disponibilité et notre préoccupation envers le patient qui pourra se saisir des aides quand il le souhaitera.
D’autre part l’évocation constante de la situation entre les deux structures permet le maintien d’une évaluation à distance de la situation et une aide à la réflexion et à la distanciation nécessaires à la compréhension de situations complexes et chroniques. Une réflexion commune permet souvent de redynamiser des situations qui semblent «s’essouffler ».
Enfin cette constance malgré la dégradation de la situation, montre bien qu’en certaines occasions une évolution favorable peut se dessiner, favorisée par la ténacité de tous les acteurs concernés. Il paraît important d’insister sur le fait que malgré l’errance du patient, une prise en charge adaptée à ces situations précaires peut produire du soin.
Le CAARUD Beaurepaire situé dans le dixième arrondissement de Paris a développé un projet de santé communautaire destiné à un public originaire du Pendjab. Un des éducateurs du Centre parle Pendjabi et avec l’aide de l’équipe pluridisciplinaire, près de 200 personnes y ont trouvé un lieu ressource dans l’accès au soin, l’accompagnement médico-social, le conseil administratif et juridique ainsi que dans l’aide au retour en Inde avec un partenariat de l’OFFI et de l’OMI.
Ce lieu est unique en France et nous sommes sollicités régulièrement par différentes structures sanitaires et sociales lorsqu’elles sont confrontées à un usager originaire du Pendjab.
Le rapport d’activité 2010 détaillait les différentes actions menées dans le cadre de ce projet depuis sa conception en 2008.
Des trois axes initiaux du projet (construction d’un réseau d’intervention, fonction d’observatoire de cette population, formalisation d’une démarche reproductible pour d’autres populations), nous ne pouvons conserver aujourd’hui que le premier s’inscrivant dans l’activité du CAARUD. Nous avons développé un savoir faire avec cette population qui est progressivement sortie de la clandestinité grâce aux actions conjuguées de l’équipe et à un travail de groupe de parole avec une psychologue franco-indienne.
L’expérience menée avec cette population a mis à jour plusieurs points essentiels :
la capacité des personnes et du groupe à modifier ses comportements (en l’espace de deux ans) :
la nécessité de faciliter l’accès aux soins pour des personnes souffrants de plusieurs types de pathologies :
l’importance de la présence de traduction lors des entretiens (qu’ils soient administratifs, sociaux ou médicaux) et du travail « dans la langue » des personnes :
l’importance de la dynamique de groupe :
Une des difficultés auxquelles nous avons été confronté concerne la spécificité de ce projet.
Etant la seule structure médico-sociale travaillant avec ce public, ce dispositif a atteint les limites d’accueil du centre Beaurepaire, et doit évoluer en externalisant le lieu d’accueil des Pendjabis afin qu’ils n’embolisent pas le CAARUD (notamment pour ceux qui ne présentent pas d’addiction).
Plusieurs actions sont nécessaires :
Afin de mettre en œuvre ces différentes actions, la poursuite du projet Beaullywood nécessite un financement permettant :
Ce projet prévoit donc des créations de poste pour l’animation des séances de groupe hebdomadaires, la mise en place d’une équipe mobile, et le recueil des données et de leur valorisation.
L’aide au retour, grâce à la collaboration entre le CAARUD Beaurepaire et l’OFFII a concerné 7 personnes en 2011 (chaque dossier demande en moyenne six mois de travail).
L’objectif initial du projet Beaullywood reste d’actualité : permettre à un public ignorant tout de ses droits sociaux de sortir de la clandestinité. Un des usagers est sorti de dix sept ans de clandestinité avec notre concours et a obtenu son passeport après trois années de démarches et une dizaine d’accompagnement à l’ambassade de l’Inde.
Le Centre Beaurepaire est régulièrement sollicité par les hôpitaux publics de Paris, notamment l’HEGP et hôpital Saint Louis. Nous accompagnons quotidiennement et hébergeons un usager sous tri-thérapie VIH qui a été hospitalisé plusieurs mois à l’HEGP avant la mise en place de son traitement.
Le Projet Beaullywood est devenu outil de travail pour plusieurs structures comme Les maraudes de La Croix Rouge Française et d’ Emmaus qui sont en contact avec le public punjabi Indo-Pakistanais en grand précarité et isolement social.
Nous sommes régulièrement sollicité par les travailleurs sociaux de ces associations en médiation / interprétariat, car le public Pendjabi qu’ils rencontrent a un niveau scolaire très modeste et des particularités socioculturelles souvent difficiles à appréhender.
Pacôme HUET
Juriste de l’association Accès aux Droits Solidarité Paris, assurant une permanence juridique d’une demi-journée par semaine au sein du CAARUD Beaurepaire depuis le mois d’avril 2011, ma fonction consiste non seulement à informer les usagers de leurs droits, en leur expliquant la façon de les faire valoir, mais aussi, pour beaucoup d’entre eux, de les accompagner pas à pas dans leurs démarches.
Depuis que j’assure la permanence juridique à Beaurepaire, les usagers que j’ai eu l’occasion de recevoir, sont venus pour des problèmes très variés et renvoyant à de nombreux champs du droit. Néanmoins, les questions posées relèvent principalement du droit des étrangers (68%) et du droit pénal (18%) et dans une moindre mesure du droit social (4%) et du droit de la famille (2%).
Les difficultés majeures rencontrées lors de ces suivis résultent de la condition même des usagers, qui vivent sans toit et sans lieu sûr où entreposer leurs affaires. De ce fait, ils ne conservent que ce qu’ils considèrent comme essentiel et la « paperasse » bien souvent n’en fait pas partie. Il est alors difficile de faire valoir des droits et c’est à nous, juristes et travailleurs sociaux, de les aider à entreprendre des recherches afin de reconstituer le fil de leur parcours, de retrouver des traces, des indices, des preuves…
Pour des personnes en conflit avec la société et son organisation, le juriste d’accès aux droits peut être un médiateur qui aide à la réhabilitation du dialogue comme méthode. Les entretiens ont l’avantage de créer une dynamique et une confiance dont ils ont besoin pour persévérer dans des procédures judiciaires ou administratives souvent longues.